Quand au détour d’un lien surprise, on tombe sans savoir ce qu’on va voir sur le travail de Mimi Choi, on pense regarder un compte Instagram d’une artiste digitale douée fortement portée sur le surréalisme. Puis on repère dans la description le "#makeupartist" (soit artiste du maquillage), et on comprend qu’on a affaire à une maquilleuse complètement hors normes.
Tout d’abord Mimi Choi atteint un degré de réalisme assez peu courant, ce qui montre un savoir-faire technique plutôt exceptionnel. Mais heureusement, il ne s’agit pas que d’une démonstration, elle met ses capacités au service d’un surréalisme débridé. Et elle semble prendre un malin plaisir à développer une illusion visuelle troublante à laquelle on se laisse toujours prendre jusqu’à un sentiment de malaise parfois. Ce qui achève de nous convaincre.
Il est particulièrement étrange de circuler sur son compte Instagram (avec une grande communauté de plus de 1,5 million de followers) et d’alterner images fixes puis movies dans lesquels ces images fixes s’animent, toujours de façon très surprenante. Les yeux se dédoublent, les visages se déforment, et l’on se retrouve en face de portraits mélangeant plusieurs faces de la même personne. On ne sait pas toujours quelle partie du visage on regarde, la vraie ou la fausse. Il en surgit une beauté fulgurante ou cauchemardesque selon les cas. Ce qui est troublant de surcroit, c’est que cette "même personne" à multiples visages est bien souvent Mimi Choi elle-même. C’est à dire qu’elle s’auto-maquille en ces créatures hybrides fascinantes.
Mimi Choi dit que ces sources d'inspiration ont des origines innombrables, comme c’est le cas pour beaucoup d’artistes. Des motifs et des textures qu'elle trouve dans sa vie quotidienne, de l'art numérique ou des peintures d'artistes surréalistes comme Salvador Dali ou M. C. Escher. Mais elle a la particularité de souffrir d’un trouble singulier, elle traverse des épisodes de paralysie du sommeil. Des expériences de catalepsie qui la laissent souvent paralysée au réveil, bien que consciente. Dans ces moments, Mimi a des hallucinations vives et souvent effrayantes, elle visualise les visages plus morbides, déformés, distordus qu'elle transfère ensuite à son corps. Le cauchemar et sa fascination sont donc bien tout proches. Pour le plaisir de nos yeux.
