En entrant dans "Katalog" de la photographe belge Barbara Iweins, on pénètre chez elle en quelque sorte. Barbara : "Concrètement, pendant 2 ans, 15h par semaine, j’ai mis en scène et photographié les 10.532 objets de ma maison. Ensuite par un travail de classement encyclopédique, j’ai classifié chaque objet selon son matériau, son degré d’utilisation, sa couleur"…  (Voyez comment elle a procédé). 
On est pris d’un frisson de plaisir d’enfant qui s’introduit dans un magasin de jouets, tous ces objets deviennent attirants et beaux, isolés sur leur fond. Même les ustensiles les plus usuels sont transcendés en choses de convoitise si bien présentées et rangées, de plus on peut les classer soi-même par couleur, par forme. (Il y a même une catégorie :"ceux que je sauverais d’un incendie")
Tous les articles verts réunis se transforment du coup en une jolie collection en camaïeu. C’est comme un catalogue de vente dans lequel, par bonheur, on ne peut pas acheter, on a juste à compulser. Comme adulte par contre on est plutôt pris de vertige à circuler parmi 10 532 éléments de sa maison, on espère en avoir beaucoup moins, et être plus à distance d’un possible syndrome de Diogène. 

On se dit : "Celui-là j’ai, celui-là j’ai pas" … Nous nous comparons sans cesse. Katalog nous interroge sur notre propre consommation, nous sommes attirés par les biens, la richesse, la propriété, mais le plus important est d’afficher nos possessions et nos actes, sur les médias sociaux par exemple, par peur d’être insignifiants. Katalog est donc aussi une accumulation de questionnements et de critiques sur nos propres comportements d'acheteurs compulsifs. Barbara : "J’ai déménagé 11 fois dans ma vie… A chaque fois j'étais terrifiée par la quantité de choses que je devais emballer. Cela m’a fait réfléchir à valeur des choses que je possédais et le concept de gratification instantanée".

"Nous achetons des choses pour se soulager, s’enivrer, se réconforter. Pour se rendre un peu plus heureux ou un peu moins malheureux. Pour ne pas trop penser à ce qui est compliqué dans nos existences. On dépense pour dé-penser." (Christophe André) 

Barbara : "Dans le même ordre d’idée, chaque geste, chaque voyage, chaque achat est dévoilé à la vue de tous sur les réseaux sociaux. On collectionne les "likes" dans l’espoir qu’ils nous rendent heureux. A travers cette quête perpétuelle de reconnaissance, nous recherchons, à nouveau, ce bonheur factice qui ne comble que de façon éphémère cette sensation de faim". 

Barbara : "En somme, cette abondance de gratification online est comparable à notre consommation exacerbée. Tous deux nous éloignent pendant un court instant de nos vraies peurs qui demandent du temps, de l’effort et de la réflexion pour être surmontées. Avec ce constat en tête, je devais faire face, en toute transparence, à la valeur de toutes mes possessions". 

Barbara étale tout ce qu'elle possède mais sans enjoliver comme il est d'usage : "Katalog est une performance qui m’amène donc, à dévoiler au public tout ce que je possède, sans filtre, sans sélection préalable et en une fois. En somme, l’exposition du soi poussée à son paroxysme".

Barbara prévoit d'exposer Katalog une fois le projet terminé, en voyageant avec l'exposition autant que possible en 2022