Ce qui nous a tout de suite interpellé dans le travail de Sandra, c'est le mélange de force et de fragilité qui ressort de ses clichés. Il y a quelque chose d’indéniablement puissant qui se dégage des corps âgés, marqués, ridés, parfois blessés, qu’elle expose. Et pourtant les tons pastel, les fleurs, les fruits et la dentelle qui décorent ses compositions expriment une candeur et une fraîcheur toute particulière.

Photographe autodidacte, Sandra entretient un rapport assez naturel et léger à son moyen d’expression.
Sandra Lazzarini : " J’ai abordé la photographie quand j’étais jeune et j’en suis tombée amoureuse il y a plus de vingt ans. Je n’ai pas fait d’école de photographie. J’ai seulement participé à un atelier de photographie de rue à New York en 2014. J’ai tout appris et créé de manière autodidacte.
J’ai commencé en prenant des photos argentiques assez classiques : des paysages, des rues avec leurs passants, des photos de voyages lors de sorties scolaires… C’est ainsi que j’ai appris à utiliser l’appareil comme un jeu. Au fil du temps, c’est devenu un véritable outil de communication. J’ai développé ma propre esthétique qui est restée assez constante, les années passant, au niveau de ses sujets : femmes, fleurs, fruits, sous-vêtements… "

Autoportrait

Pendant plusieurs années, Sandra s’est dédiée à l’autoportrait. Elle se cachait derrière des objets ou des éléments naturels pour se dissoudre dans les paysages photographiés. Puis ces dernières années elle a commencé à se consacrer aux corps féminins.
Sandra Lazzarini : " J’aime le corps féminin sous toutes ses facettes. J’aime le corps féminin dans sa pureté : ses poils, ses marques, ses tâches, etc… J’aime trouver la beauté là où elle existe déjà, la mettre en valeur et la souligner pour la rendre universelle à tout âge. Je pense que photographier des femmes dans leur unicité m’aide à faire la paix avec tout ce que je n’accepte pas de moi-même. Et le même phénomène se produit pour celles qui décident de poser devant l’objectif. " 

Sandra Lazzarini : " J’aime aussi créer des natures mortes, parfois en décomposition, en faisant parfois des références supposément inconscientes à la sexualité. "

Les objets ont effectivement une place importante dans les compositions de Sandra. Leur usage a quelque chose de délicieusement incongru : fleurs nichées dans des endroits improbables, sous-vêtements déviés de leur rôle initial, fruits détournés de manière comique… On ne peut s'empêcher de se demander comment se déroulent les shootings qui donnent naissance à ces scènes divinement absurdes.

Sandra Lazzarini : " Pour moi, l’idée d’une photo et l’acte photographique doivent venir de la manière la plus naturelle possible. L’idée doit surgir comme un éclair de génie et la création doit se faire lentement, en pensant bien la composition. Je suis très pointilleuse et tout doit être parfait avant le clic. C’est aussi parce que je n’aime pas la post-production. " 

Sandra Lazzarini : " Dès que la phase obsessionnelle et compulsive qui émane d’une idée se termine, alors la photographie commence pour moi. Et elle passe par la magie de la couleur, la composition, la forme et l’esthétique. Généralement mes modèles se détendent énormément (parfois elles ont même tendance à s’endormir) parce que je suis très lente dans la mise en place de ma composition et il se passe un certain temps avant le clic final. "

Le premier recueil de photographies de Sandra, Me and other things (Moi et d’autres choses) (ici), vient d'être publié chez Snap Collective. L’objet, dont le sous-titre est An unconventional gaze (Un regard non-conventionnel), rassemble les clichés de l’artiste qui dépeignent au mieux sa vision intimiste du corps féminin.

Lorsque l’on demande à Sandra de nous recommander un.e artiste, c’est vers Alice Hualice qu’elle nous dirige : une jeune artiste russe qui manie photographie, collage et sculptures textiles dans des compositions aux accents mystérieux.

Instagram
Site

Quant à nous, nous vous proposons de continuer un peu votre lecture en découvrant le travail de Lin Yung Cheng, un artiste taïwanais qui aime également jouer photographiquement avec le corps féminin.