Le train est un drôle d’endroit pour des rencontres, ce n’est pas vraiment un lieu, ou c’est un lieu qui flotte entre deux mondes. Un espace un peu magique parfois, ce train-ci ne s’arrête pas, n’a pas de destination et donc pas de but. Un milieu tout à fait propice à ce film qui oscille aussi entre narration, et surréalisme voire absurdité. Dans un train, il y a toute sortes de gens et différents aspects de la société, et pour peu qu’un peu de fantasque s’y glisse, comme un bébé géant, une femme romantique et son coucou, un garçon naïf avec des images de licornes, la situation dérape dans le surréel. 

Ce bel objet irrationnel et réussi a été dirigé par une toute jeune réalisatrice en animation Nelly Michenaud dont c’est le film de fin d’études à la prestigieuse NFTS, la National Film Television School en Angleterre. Splendide démarrage donc. L’idée de réalisation brillante est que tous les éléments créés par l’homme sont en stop motion réaliste, tandis que tout élément organique (corps, nourriture, nature) est du dessin fluide et libre. Ce qui fait que la touche surréaliste du film explose dans un environnement réel, tangible, avec un résultat plus fort encore.

Nelly Michenaud dit avoir eu comme inspiration de départ Le Mythe de Sisyphe, un essai d'Albert Camus, publié en 1942. Dans cet essai, Camus introduit sa philosophie de l'absurde : la recherche en vain de sens de l'homme, d'unité et de clarté, dans un monde inintelligible, dépourvu selon lui de Dieu et par conséquent de vérités et valeurs éternelles. La prise de conscience de l'absurde nécessite-t-elle le suicide ? Camus répond : "Non, elle nécessite la révolte". 
La narration d’Almost There progresse doucement mais sûrement vers du fantastique, et la carrière de Nelly Michenaud avec.