Nous allons pénétrer dès à présent dans l’antre d’un collectionneur d'objets électroniques vintage qui est aussi un artiste visuel. Du coup il marie des éléments de sa vaste collection pour construire des petites installations aux vibrations délicieusement analogiques. Accueillantes comme un bon feu de cheminée baignant dans le son de synthétiseurs de première génération.

On sent chez Joshua Ellingson, l'amour inconditionnel des collectionneurs pour leurs acquisitions. Mais comme c’est d’abord un artiste, il a voulu aussi en exploiter les particularités esthétiques, et il les a combinées entre elles, qu’elles soient anciennes ou récentes. Il interface ainsi des logiciels et des ordinateurs de dernière génération avec des téléviseurs anciens et même des oscilloscopes. Il produit ainsi de l’"oscillo Art", un art électronique et analogique de niche au rendu surprenant. 

Les images générées par un logiciel récent et visualisées par un oscilloscope sont très basiques mais elles ont ce tremblotement lumineux qui les rend si séduisantes. Et comme Joshua Ellingson prend un grand soin à filmer ses installations, il en résulte de petits films avec cette sorte de grâce magique et merveilleuse qui parle aux grands enfants que nous sommes restés. Ces petits dispositifs visuels sont accompagnés ou générés par des musiques produites par des synthétiseurs électroniques d’une conception datant des années 60, les Moog. Les machines contemporaines et les logiciels de dernière génération se dissimulent dans cet environnement sonore et visuel vintage, où tout est cohérent.

Joshua Ellingson est par ailleurs un directeur artistique graphiste illustrateur comblé ayant travaillé sur toute sortes de projets et également enseignant au California College of the Arts. Il y enseigne à ses étudiants comment faire de l’art avec des ordinateurs. Son amour des machines vintages et de l’"Oscillo Art" sont donc une sorte de hobby artistique et technologique (très prenant sans aucun doute...) qu’il met parfaitement en scène. Intrigués.es, nous lui avons demandé pourquoi et comment il interfaçait tout cela ensemble
Et cela tombe bien, car il nous répondu gentiment.  

Joshua Ellingson : "Un jour, un de mes amis m'a prêté son oscilloscope. J'avais déjà entendu parler de l'art de l'oscilloscope, alors j'ai appris à en faire en regardant des vidéos YouTube et en expérimentant. Le logiciel que j'utilise peut fonctionner avec l'application 3D Blender, il n'a donc pas été très difficile de générer des fichiers sonores visualisant des formes de lettres en 3D avec ces outils".

Les machines de prédilection de Joshua Ellingson sont pour certaines disponibles dans le commerce sans avoir besoin de chiner. Il partage avec vous sa liste de matériel de base Pour ceux qui voudraient s’y mettre.
Joshua Ellingson : "J'utilise un Mac Mini M1 sur lequel tournent des logiciels comme VDMX, OsciStudio, Blender, et d'autres. Je connecte souvent des télévisions anciennes comme deuxième moniteur en utilisant des adaptateurs HDMI>Vidéo composite>Modulateur RF. Pour le son, j'utilise un Moog Mother-32 (un synthétiseur semi-modulaire intuitif et extensible), un Moog DFAM (Drummer From Another Mother)( DFAM® est un générateur de motifs percussifs) et un Moog Subharmonicon (un synthétiseur analogique polyrythmique semi-modulaire pour explorer le monde des subharmoniques, des polyrythmes) ainsi qu'un KORG Volca Sample. Je les interface avec mon Mac à l'aide d'adaptateurs CV>MIDI et d'interfaces audio USB de Focusrite. Il y a toujours beaucoup de matériel très diverse impliqué dans ce genre d'art".
Tout cela n’est pas forcément du matériel cher et compliqué puisqu’un "Moog Studio" comprenant les trois modules dont parle Joshua ci-dessus est à moins de 2000 euros. Il ne faut cependant pas avoir peur de dépenser du temps.

Joshua Ellingson : "Je m'intéresse au bricolage depuis que je suis très jeune mais je n'ai commencé à entamer une démarche artistique impliquant de l'électronique que depuis 2019. J'ai commencé à collectionner des téléviseurs vintages et à faire des expériences avec eux. Chaque découverte présente en quelque sorte le prochain défi et cela a évolué naturellement".

Joshua Ellingson : "Les vidéos de "Esme Ash" et "Hands" sont manipulées en temps réel par mes synthétiseurs à l'aide du logiciel de performance live VDMX. Il recherche des signaux audio et MIDI pour contrôler la lecture de la vidéo en fonction de paramètres que j'ai définis au préalable. Je filme la vidéo résultante à l'aide d'une caméra numérique et je la monte avec le logiciel de montage vidéo DaVinci Resolve".

Joshua Ellingson : "Pour moi, l'inspiration vient du fait de déplacer les téléviseurs et d'expérimenter avec le son. Je n'ai pas souvent une idée précise avant de m'asseoir pour créer quelque chose. Elle se développe en quelque sorte pour devenir ce qu'elle veut être".

Joshua Ellingson : "Ces dispositifs et installations, c'est très égoïste, honnêtement, je les fais pour moi et si d'autres personnes les aiment et s'y identifient, c'est génial".

Vous l’aurez deviné aisément Joshua Ellingson est un fou de matériel électronique vintage et le démon de la collection l’habite. Voici un aperçu de ses possessions.
Joshua Ellingson : "J'ai plus de 20 téléviseurs allant de la fin des années 1950 aux années 1990 et la plupart d'entre eux sont des postes du début des années 1970. L'un de mes préférés est un Zenith recouvert de denim et de cuir comme une paire de bluejeans de cow-boy. J'ai trois oscilloscopes différents, quelques microscopes, et plus de synthétiseurs que nécessaire (je ne me considère pas comme un musicien) mais j'aime les sons de Moog et Korg. J'ai aussi une radio en forme de femme nue. Il y a vraiment trop de choses en vrac à énumérer, mais j'essaie de garder les choses organisées".

Joshua Ellingson : "Toute personne intéressée par l'art audiovisuel devrait découvrir le travail de Charlie Visnic sur l'audio et la vidéo. A voir également ici. Enjoy !