C’est une mise en bouche appétissante que nous vous proposons sur la prolifique imagination de l’artiste israélienne Ronit Baranga et sa fort étrange production de sculptures . Des visages d’enfants ou des bouches dans de la vaisselle, des doigts en guise de support pour un bol ou une théière, des mains qui pullulent de toute part, des bouches qui sortent des gâteaux. Ronit Baranga essaye de changer la façon dont nous observons la vaisselle ou une part de gâteau, pour être perçue comme un objet actif, conscient de lui-même et de son environnement, qui décide seul de la manière dont il doit se comporter dans une situation donnée. Les friandises ont leur propre bouche, attendant leur chance pour mordre. Qui mange qui ? De l’épouvante et de la fascination dans des objets réels, utiles ou délicieusement comestibles. C’est pourtant cette attraction-répulsion qui fait tout l’intérêt de son travail dont la beauté et la dissonance sont des aspects intentionnels.

"Ce que je trouve le plus fascinant dans la sculpture, c’est l’acte physique, sentir le matériau sous mes doigts. C’est pour cette raison que les mains sont très présentes en tant que sujet dans mes travaux" 
Il y a aussi des actes physiques sur cette table, elle est une petite société, habitée de tentations et de tensions fortes. Chaque membre remplissant son rôle dans cette petite compagnie vivante et grouillante. Il y a quelque chose d’orgiaque et de sensuel dans ce qui se déroule, les bouches et les doigts avides sont partout. Les friandises sculptées et peintes en détail sont à la fois un objet de beauté et un péché de gourmandise. De la gelée rouge brillante recouvre la tarte aux fraises de créatures à la bouche ouverte. Un baiser dans l'air d'une bouche juxtaposée au geste érotique ludique d'une autre, tandis qu'une troisième est prête à enfoncer ses petites dents pointues dans la main tendue.

L'installation aborde aussi la relation complexe que nous entretenons avec les produits de luxe, en particulier avec la nourriture : les émotions mêlées du besoin et de la faim insatiable de plus de sucre, plus d'attention, plus d'amour. Il y a une poussée constante au-delà des limites de la consommation raisonnée, une soif de sucre, une tentation permanente d'en avoir plus et trop. Nous savons que nos vices secrets ne resteront pas impunis. Nous nous torturons à la seule pensée d'une luxure joyeuse et insouciante.

Sur son site vous verrez qu’elle est très productive et qu’elle a beaucoup de sujets de prédilection impliquant toujours de l’anatomie humaine. Elle sculpte le corps sans erreur pour inciter le spectateur à s'en approcher, à l'examiner et finalement à s'y attacher. Il y a toujours une ambiguïté et un élément d'inattendu dans son travail. Les corps humains, les bouches, les mains, les doigts, les expressions, les attitudes et les postures entraînent le spectateur dans un monde surréaliste fait de belle fascination et de doux malaise.